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Interview : La Parenthèse

Le 16 mars sera inaugurée La Parenthèse, la très attendue médiathèque 3ème lieu qui fera bientôt partie du quotidien des Quetignois. Dans la perspective de cette inauguration, nous avons souhaité interviewer Véronique Brézault, bibliothécaire rue des Vergers pendant la dernière décennie, et Blandine Schwirtz, qui lui a succédé il y a quelques mois pour prendre la tête de ce nouveau lieu de vie et de culture. Elles ont accepté très volontiers de nous répondre, dans une période pour elles bigrement occupée !

                  

Réinventons Quetigny : Nous sommes à la Parenthèse. Véronique, tu dirigeais auparavant la bibliothèque de Marsannay, avant celle de Quetigny dont tu as été responsable pendant 10 ans. Quels ont été les grands axes de ton action et de celle de ton équipe à Quetigny ?

Véronique : En fait, on préparait déjà la future bibliothèque : lorsque j’ai été recrutée, Mireille Gauthier souhaitait lancer cette idée pour la ville. Mais à l’époque, l'équipe municipale, avec le projet « Cœur de ville », voulait créer un établissement d'animation culturelle sur la place centrale. Je me suis dit qu’une médiathèque 3ème lieu était tout à fait dans cet esprit-là. Et du coup, on a essayé d’inspirer un esprit « 3ème lieu » dans l’ancienne bibliothèque pour commencer à préparer le 3ème lieu La Parenthèse.

C’était vraiment important pour moi. Évidemment, il y a eu le Covid entre temps ; mais au départ on offrait le café, on avait des moments où les lectrices, par exemple, venaient nous montrer comment on brode, comment on fait un sac de bibliothèque... On avait vraiment une émulation entre les lecteurs ; je trouve que c’était vraiment très précieux.

Ma première tâche a été de refaire un espace multimédia : à l’époque, il était coincé entre deux rayonnages, le fonds Afrique et le fonds littérature... Ce n’était pas très accueillant ! On a donc démoli une cloison pour pouvoir agrandir et donner de la place au multimédia et à tout ce qui était apprentissage des langues. Tout de suite après, on en est venu au projet "médiathèque 3ème lieu" et on a été aidé par des spécialistes. D’abord, pour préparer sa mise en place, il fallait de l’argent et donc créer un projet de service dénommé « projet culturel, scientifique, éducatif et social » (ou P.C.S.E.S.), condition obligatoire pour l’obtention de subventions.

Tu parlais du Covid. Quelle était la fréquentation avant la pandémie, et quelle est-elle aujourd’hui ?

Véronique : Aujourd’hui, on est revenu au niveau d’avant le Covid ; mais il a fallu du temps pour reprendre des habitudes. Lorsqu’on perd l’habitude d’aller dans un lieu, il faut tout un tas d’événements pour y ramener les gens.

Et de quoi es-tu le plus fière ?

Véronique : En fait, d’avoir démarré ce projet, ce qui n’était pas gagné au départ. On voyait bien que les élu·e·s avaient pensé plutôt à un projet type "Centre social", comme La Passerelle par exemple. Et moi, je savais qu’il fallait vraiment un projet type "Médiathèque", parce que si on reste dans le lieu de la bibliothèque actuelle, on meurt ! En effet, la médiathèque, c’est la base de tout ce qui est culture, mais aussi le vivre ensemble, l'éducation, etc. On avait quand même une grande importance pour les enfants ! On reçoit du plus jeune au plus âgé, des mamans avec leurs bébés, et quand on ne peut pas recevoir les personnes âgées, on va chez elles...

Donc, c’était vraiment important pour moi que ce projet voie le jour. On a eu le concours d’une personne spécialisée dans les médiathèques 3ème lieu, Amandine Jacquet, qui nous a aidé·e·s à rédiger le P.C.S.E.S.  On a eu ensuite l’aide d’une « programmiste », Caroline Semin (de l’agence Syllab à Paris), et aussi celle du cabinet Sirventès, qui avait fait le projet culture de la commune, où la bibliothèque apparaissait comme la première attente des habitant·e·s ! ça nous a beaucoup aidé·e·s.

Puis j’ai organisé une formation pour les élu·e·s sur les médiathèques 3ème lieu, avec Pascal Desfarges, très au fait des évolutions des bibliothèques, mais aussi des smart cities... tout ce qui est actuellement à la mode sur le recours au numérique ! Je me disais que ça plairait pas mal, et cette petite formation d’une demi-journée, mise en place avec Nicolas Zucchiatti (du cabinet du maire à l‘époque) a été très utile.

C’était quand ?

Véronique : Tout à fait au début, en 2016.

Et as-tu des regrets ? Si oui, lesquels ?

Véronique : De ne pas pouvoir continuer complètement avec l’équipe, car je suis partie en retraite ! (rires).

Mais tu seras là pour l’inauguration ?

Véronique : Oui, même avant ! Et je ne serai pas loin. J’ai un autre regret, par rapport à l’autre médiathèque, c’est de ne pas avoir fait comprendre à pas mal de personnes qu’une médiathèque, on y va... même si on n’y emprunte pas de livres, si on n’y lit pas ; c’est un acte social, citoyen !

Et quand on a ouvert le dimanche, je me suis dit : « ça va donner une émulation, il y aura de nouveaux publics ». En fait, ça ne s’est pas passé comme prévu. C’est vrai qu’on a eu le Covid, des tas de soucis, mais je trouve qu’il faut que les gens se disent : « moi aussi je suis concerné », même si c’est pour faire un tour, boire un café, proposer une animation, aider un gamin, lui lire une histoire... Il est important que les habitant·e·s de Quetigny sentent que c’est à eux de faire vivre ce lieu. Ça, c’était quelque chose que j’avais beaucoup connu à Marsannay... avec un esprit plus « village » : les gens venaient, ils vous disaient : « tiens, je vous fais un concert, j’ai une expo ». C’est pour cela qu’on avait instauré « nos lecteurs sous les projecteurs », avec l’idée que chacun pouvait agir, participer...

Il y a des étudiant·e·s à Quetigny, les soirs ou même les week-ends, qui aimeraient faire des révisions. Y a-t-il quelque chose de prévu ?

Blandine : On vient de finir de travailler sur les horaires. Un soir par semaine, le vendredi, on fermera à 20 h. Le samedi sera ouvert ainsi que le 2ème dimanche après-midi (de 14 h 30 à 17 h 30) de chaque mois, et on gardera 2 "midi-deux" par semaine. On va commencer comme ça, et on verra s’il y a des demandes, des besoins pour de nouveaux publics. On commence ainsi pendant 6 mois/1an pour tester comment ça fonctionne, et ensuite on affinera en fonction des besoins.

Véronique : C’est important, la culture du test ! On le fait tous ensemble, pour s’adapter aux besoins des usagers, non seulement pour les horaires, mais aussi pour les espaces, les rayonnages, etc.

Blandine : C’est dur de prévoir exactement ce qui est nécessaire avant d’être dans les lieux et d’établir le contact avec le public. On commence avec cette médiathèque, qui est l’une de celles ayant le plus d’amplitude horaire sur la Métropole. Ensuite, on regardera notamment sur la tranche horaire 12-14 heures.

Véronique : dans leur étude sur les usagers de Quetigny, Amandine Jacquet et Giacomo (de Sirventès) s’étaient rendu compte qu’il y avait de plus en plus de demandes de personnes âgées et qu’il y avait une zone commerciale où il y a des gens qui travaillent et où on propose aux gens d’aller acheter, consommer. La médiathèque, ça va être le contraire de la consommation ; ce sera le partage, ce sera un peu le « Notre-Dame des Landes » de Quetigny. Non, je rigole ! Mais vous voyez ce que je veux dire... un lieu où les gens doivent s’engager, où il faut vraiment du partage...      

Blandine : Et il y a plein de gens qui n’habitent pas Quetigny, qui viennent y travailler, qui mangent vite fait, quand ils ont un petit peu de temps, quand ils arrivent à se trouver un coin sympa... mais sur la zone commerciale, il n’y a pas forcément ce genre d’endroit où se poser tranquillement, et c’est ce qu’on espère pouvoir proposer ici.

Véronique : On avait déjà essayé dans l’ancienne bibliothèque en élargissant les horaires avec le mardi, en élargissant les horaires : on avait tenté un "midi-deux" ; et aussi l’ouverture du dimanche. Mais ça n’avait pas ramené beaucoup de personnes. On a déjà une belle amplitude horaire, qui va encore augmenter.

Blandine : On sera à 30 heures 30 d’ouverture hebdomadaire, sans compter le dimanche.

 

Dans l’agglomération dijonnaise, y a-t-il d’autres structures du même type ?

      

Véronique : Non non, on est des pionnières, bien sûr ! (rires). Non, il y a Mansart, tout de même !

      

Blandine : Les médiathèques 3ème lieu sont quand même « à la mode » depuis un peu plus d’une dizaine d’années, et effectivement, la bibliothèque Mansart met ça en place ; elle a réorganisé son espace, en faisant du coopératif, avec le public. Mais pour le moment, il n’y a pas de bâtiment ou de structure qui ait été spécialement conçu(e) dans ce sens-là. C’est donc un investissement de la mairie et de la DRAC (l’État a beaucoup participé au projet) qui mérite d’être souligné !

      

Un mot sur les partenaires extérieurs, associations ou autres ?

      

Blandine : Il y a deux instances principales pour la Parenthèse :

–  le comité de pilotage, dirigé par le maire, avec des élus et des représentants d'associations, qui donne les grandes orientations, et qui revient en particulier sur l’année précédente pour voir ce qu’on peut améliorer, comment on peut faciliter l’accès, qui réfléchit sur la stratégie...

– le comité de programmation, avec les représentants des services municipaux, des associations, des usagers, qui est là pour proposer des thématiques, des animations, des projets qu’on peut construire en commun, dans le cadre de la programmation annuelle. On y choisit, parmi les propositions, ce qui relève vraiment de la Parenthèse ; on retient surtout les projets transversaux, pas forcément ceux qui impliquent absolument tout le monde (car il faut tenir compte des lourdeurs potentielles), mais surtout ceux qui concernent 2, 3, 4 partenaires et qui impliquent vraiment les habitants... On retient parfois des projets d’une seule composante, la ludothèque ou la médiathèque par exemple, mais dans le but, quand même, de toucher un certain public... et de faire venir les gens à La Parenthèse. Des projets peuvent venir de l’extérieur et être accueillis par la Parenthèse. C’est d’ailleurs pour cela que la mairie s’est prononcée pour rendre l’accès gratuit à tou·te·s, Quetignois·es ou non.

Blandine, quand et comment es-tu arrivée à la bibliothèque de Quetigny ?

Blandine : Je suis arrivée en décembre 2018. Avant, j’étais responsable informatique et numérique à la bibliothèque de Chalon-sur-Saône. Il y avait un poste d’adjoint à la direction...

Véronique : Non, même pas !  Au départ, on devait simplement remplacer une personne qui partait à la retraite, et qui était cadre B. Blandine était cadre A. On a discuté avec le maire, et je lui ai dit : « Moi, je veux Blandine ! ». Le maire était tout-à-fait d’accord avec ça ; il a appuyé, et il a dit : « c’est la personne qui vous succédera ». Ça a été déterminant... Je la voulais !

Blandine : Quant à moi, j’ai redécouvert le métier de bibliothécaire  en arrivant à Quetigny : dans mon poste à Chalon, j’étais très axée informatique-numérique, donc pas impliquée dans le quotidien du métier de bibliothécaire... Merci, Véronique !

Véronique : Je l’ai "découverte" à Marsannay-la-Côte, au départ parmi des bénévoles qui étaient devenus vacataires... et qui avaient une joie de vivre, un sens du partage impressionnants ! Elles apportaient leur machine à coudre, elles invitaient les assistantes maternelles, on cousait des petits livres... Ça, franchement, c’est ce qu’on veut donner comme impulsion.

C’est important de pouvoir passer le flambeau, d’avoir suffisamment de temps et de construire des choses ensemble. C’est une chance !

​      

Véronique : Oui, mais en revanche, elle nous a fait un petit bébé, entre temps !

Blandine : Je suis arrivée en décembre, je suis repartie en février ! (rires).

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Donc, Blandine, tu t’es principalement investie dans ce projet-ci ?

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Blandine : Non, il y avait quand même beaucoup de quotidien à gérer... Il y a eu toute une période où on était avec la programmiste ; c’était surtout elle qui travaillait sur le projet en faisant des réunions de temps en temps, mais ce n’était pas aussi intense que ça peut l’être depuis quelque temps... Après, les architectes ont pris le relais, et on a été énormément accompagné par la directrice des services techniques, Adeline Mathieu, qui a fait un boulot remarquable... Elle était architecte elle-même.

Véronique : Et puis, elle est très carrée, Adeline ! Elle nous recadrait bien, quand on s’égarait...

Blandine : Elle nous expliquait les choses, un dialogue se construisait ; c’est vraiment un plaisir de travailler avec elle !

Il y a donc eu toute une partie où c’était énormément du technique, de la construction... Nous ne sommes pas tant que çà intervenues là-dedans, nous étions régulièrement sollicitées pour donner nos avis, pour apporter nos arguments.

Véronique : C’est essentiellement sur les usages que nous avons eu un rôle important... Mais le régisseur technique, Jean-Sylvain Michel, par exemple, a beaucoup participé à la salle d’animation, pour dire : « je veux des rails comme ça », « il faut penser à ça »... parce que le service culturel va être là ; il n’y a pas que la médiathèque !

Blandine : En revanche, nous avons tout le temps été sollicitées ; nous avons tenu à être impliquées dans le projet, les collègues s'adressaient à nous pour divers usages du lieu, pour éviter de créer quelque chose de totalement déconnecté du quotidien dans la médiathèque que deviendrait ce bâtiment.

 

Et avez-vous souhaité impliquer les lecteurs de l’ancienne bibliothèque, avec des questionnaires, par exemple ?

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Blandine : Alors, on a beaucoup questionné les scolaires qu’on recevait. Il y a eu des concertations publiques début 2023. 

Véronique : C’était plus informel. Par exemple, quand il y avait un marché bio, il y avait un stand où on discutait avec les gens. Ils pouvaient aussi exprimer leurs petites envies par des messages sur papier sur des "arbres à vœux", par exemple. Ça peut paraître anecdotique, mais...

Blandine : C’est ce qui permettait le plus d’avoir des d’échanges pertinents, constructifs ; parce que, via des questionnaires, on limite toujours forcément, on oriente les réponses... L’important, c’est vraiment de discuter avec les gens.

Véronique : Les causeries, aussi, ont été l’occasion de présenter le projet, toujours sous forme de discussion. Ça s’est fait avec des gens qui étaient volontaires.

      

Quelles ont été et quelles sont vos relations avec l’équipe municipale dans la mise en œuvre du projet ?

Blandine : Ça dépend des phases de la conception du projet, des sujets concernés ; mais de manière générale, les services techniques ont joué, on l’a vu, un rôle essentiel.

      

Véronique : En ce qui concerne les élus, le PCSES, qui a vraiment été le point de départ du projet, a été conçu avec les élus et avec les services ; les élus avaient eu un séminaire de leur côté, nous aussi avions travaillé dans notre coin en 2006 avec l’équipe, en suivant la ligne directrice « ça serait quoi, votre bibliothèque rêvée ? ». Après, la formatrice Amandine Jacquet, bibliothécaire territoriale, a posé la question : « votre 3ème lieu rêvé, ça serait quoi ? »... Elle l’a demandé aux élus et aux services. Et ensemble, on avait déjà fait les 3 axes du PCSES : lien social, égalité des chances, environnement et patrimoine ; ces trois axes ont donc été établis dès le départ, et c’est avec ça qu’on a développé le projet. Ensuite, on n’a cessé de rencontrer les élus, dans les commissions municipales, évidemment, mais pas seulement.

      

Blandine : Il y a aussi les bureaux municipaux, pour présenter certains projets déterminants à valider... Et puis, selon à qui on s’adresse, on inclut les élus dans la boucle pour qu’eux aussi puissent s’intégrer au projet.

 

L’implication des Quetignois·es dans le projet vous a-t-elle paru suffisante ?

      

Véronique : Oui, parce qu’avec le PCSES, on avait quand même beaucoup travaillé avec la population et les associations ; surtout, le cabinet Sirventès avait organisé des tables rondes, dès 2015-2016 ; chacune avait son sujet, sa thématique, pas seulement sur la médiathèque mais sur la culture en général à Quetigny. Tout le monde donnait son avis — même si le nombre de participants n’était pas très élevé, et c’est pour ça qu’on a aussi consulté les gens lors des marchés bio ou ailleurs — ; une table avait par exemple travaillé sur le numérique, ça avait été top, ça bouillonnait... Après, on a eu moins de temps pour bouillonner ; on est dans le dur !

      

Blandine : On a aussi constaté que les jeunes étaient extrêmement partants pour construire quelque chose avec nous ; il suffit de les lancer un petit coup... Ils ont participé au tournage du film promotionnel, ils étaient aux anges, vraiment ravis !

Excellent film ! nous l’avons vu à la cérémonie des vœux du maire...

Ils nous ont aussi aidées pour la conception des bâches (qu’on voit sur les barrières à l’extérieur du bâtiment) visant à attirer les jeunes à la Parenthèse ; et ils étaient tout contents de les voir réalisées. On a encore très régulièrement des personnes qui viennent nous proposer de l’aide pour l’aménagement intérieur. J’ai lancé récemment un appel au bénévolat pour la mise des ouvrages en rayon, et ça marche ! Même si les gens ne sont pas impliqués directement dans la conception du projet, ils participent d’une manière ou d’une autre à sa mise en place, dans un esprit de convivialité.

 

Et les associations ? Est-ce qu’il y a eu un moment précis où elles ont été sollicitées ?

​      

Véronique : Il y en a eu beaucoup ! C’est très important ! On a reçu toutes les associations dès le PCSES, dont certaines étaient incontournables... Pour La Passerelle, ça a été évident : elle va dans le même sens, elle a la même approche sur ce qu’il faut partager ; Blandine y est allée cuisiner, avec des jeunes (rires), ils sont venus faire des animations chez nous... La ludothèque intervient souvent chez nous. Avec Coagul, c’est plus ténu mais, comme ils n’ont plus de fablab, ils attendent vraiment de venir, pour le partage... et — quelque chose d’important — ils sont très logiciels libres : ça donne quand même une orientation, même s’il n’y aura pas QUE des logiciels libres ; ils ont le sens du partage. Et Il y en a d’autres... les jardins, par exemple.

Blandine : Des associations sont prêtes à s’impliquer dans la vie quotidienne de la Parenthèse. On peut avoir des associations de différents types : la ludothèque, la Passerelle, Coagul, le Théâtre de l’Escalier... mais après, on est aussi ouvert à d’autres associations qui peuvent venir proposer quelque chose beaucoup plus ponctuellement, autour duquel on puisse — c’est le principal objectif  de la Parenthèse — créer des projets entre services, avec des associations et avec des particuliers : créer quelque chose de cohérent, et pas que chacun fasse ses petites animations, ses petites actions dans son coin... créer une synergie pour avoir davantage de compétences, pour toucher davantage de public (pas pour « avoir du monde » mais pour rassembler vraiment un maximum de personnes intéressées... ça se construit avec les associations au quotidien. À partir du moment où on a eu des espaces définis, on a rencontré les principales associations pour leur présenter les espaces, pour leur présenter ce que nous envisagions de faire, et pour écouter ce qu’ils pouvaient, eux, apporter dans la Parenthèse ; et ce dès le PCSES, mais surtout depuis deux ou trois ans.

Comment le mobilier intérieur a-t-il été choisi ?

      

Véronique : Il n’y a pas eu beaucoup de problèmes... parce qu’il n’y avait qu’un seul fournisseur... mais c’était le meilleur ! (rires)

Blandine :  L’architecte a proposé, à partir de nos retours concernant l’usage que nous voulions en faire, des types de mobilier qui pourraient convenir ; on a fait un appel d’offres, un cahier des charges ; plusieurs entreprises ont répondu, et celle qui a été choisie était une spécialiste des bibliothèques.

 

Et les noms donnés à chacun des domaines créés à l’intérieur de cet ensemble (K’bane, Marelle, Labo, ...), c’est né comment ?

      

Véronique : Déjà la Parenthèse... Ce sont les habitants de Quetigny qui ont été consultés ; il y a eu une première phase où tous les habitants (dont nous) ont pu proposer des noms, puis une deuxième phase où dix noms ont été choisis par des habitants, des associations, des élu·e·s, des représentants de la bibliothèque ; il en a été retenu trois, parmi lesquels les Quetignois ont été invités à voter.

 

Donc c’est choisi, c’est  La Parenthèse ; mais quels sens peut-on peut donner à ce nom ?

      

Véronique : Il me semble que les gens voyaient très bien La Parenthèse enchantée — j’espère ! — une parenthèse dans leur vie... parce que, quand on parle de troisième lieu, ce n’est ni le travail, ni la maison : c’est un entre-deux, dans lequel on se retrouve avec des gens, où on est bien (on peut aussi citer le bistrot, avant !) ; c’est donc bien la "parenthèse" entre sa vie au travail et sa vie familiale.

 

Et les noms des sous-ensembles, alors ?

      

Véronique : Il y a la Manivelle ; c’est un rappel historique [ surnom donné, en raison de sa forme, à l’immeuble qui avait été construit à cet emplacement dans les années soixante, NDLR ] ; il a été conservé pour la salle d’animations, parce qu’on l’aimait beaucoup ; l’autre nom envisagé, le patio, faisait un peu trop « maison de retraite »... Il y a une idée d’entraînement, dans ce nom !

      

Blandine : Les noms des espaces ont été choisis principalement au niveau de la bibliothèque, avec Mathilde Barraud-Touraine, directrice du Pôle Actions culturelles de Quetigny, et notre élue Sandrine Mutin, parce qu’on voulait avoir des noms d’espaces qui représentaient les activités qui s’y dérouleraient. Comme c’était nous qui étions les plus au fait de ce qui allait s’y passer, on a essayé de trouver des noms qui pourraient parler à tout le monde.

En ce qui concerne le choix des ouvrages, des BD, des films, etc., y a-t-il aussi eu une implication des Quetignois·es ?

      

Véronique : Ah oui, c’est ce qu’on a mis en place dans la précédente médiathèque ; par exemple, avec les BD, on a avec les libraires ce qu’on appelle des "offices en bibliothèque", des sortes de dépôts-ventes : on a le droit de lire les livres, et on peut rendre ensuite ceux qui ne nous plaisent pas... Et on implique beaucoup les lecteurs, sur les BD, sur les mangas... un peu moins dans le cadre des causeries qu’on organisait. Et puis, évidemment, les lecteurs peuvent nous demander ce qu’ils veulent comme livres ; on a des cahiers de suggestions !

      

Blandine : Sauf pour les ouvrages beaucoup trop anciens, on essaie de répondre positivement à toutes les demandes des lecteurs... soit en bénéficiant de la médiathèque Côte-d’Or, qui prête à toutes les médiathèques, soit en les achetant neufs et en les mettant à la disposition des lecteurs. Ça nous tient à cœur de leur répondre ; ce ne sont bien sûr pas des "commandes", mais on essaie de les satisfaire, parce que ce sont eux qui apportent des choses qu’on aurait loupées... Et puis, ce sont les premiers concernés !

      

Véronique : Notre objectif n’est pas de bien ranger les livres dans les rayons... On veut qu’ils soient lus, et par-ta-gés ; c’est important, aussi !

 

Est-ce que le transfert est l’occasion d’un grand désherbage ?

      

Blandine : Le désherbage se fait depuis un moment ! mais il est vrai qu’on a mis un peu les bouchées doubles ces derniers temps. Et quand on le fait, on transfère les ouvrages au Comité de jumelage, qui les revend, notamment à l’occasion du marché bio. On n’a pas le droit de donner les livres gratuitement à la population... On pourrait les vendre, mais on a autre chose à faire ! On peut les donner à une association. Et le Comité de jumelage les revend pour lancer des projets.

 

Est-ce qu’il y a un local dédié à des ouvrages retirés des rayons, mais qui restent consultables ?

      

Véronique : Oui, la réserve. Il y a des ouvrages dont on ne veut pas se séparer... par exemple, le fonds local : on ne met pas tout en rayons, parce que c’est souvent un peu "moche"...  mais c’est notre patrimoine.

      

Blandine : On n’est pas non plus une bibliothèque patrimoniale, dont la mission est de conserver des documents très anciens. Notre but est de faire sortir les livres et de contenter le public.

      

Véronique : Il y a aussi des projets : par exemple, à l’occasion de certains marchés bio, on a emmené des gens se balader dans la ville, avec une présentation des arbres, de la nature, du parc des Cèdres... tout ce qui concerne le patrimoine de la ville de Quetigny. D’ailleurs, on a créé un petit endroit où les Quetignois mettent des livres à notre disposition, quels que soient ces livres.

Puisqu’il y a à Quetigny une diversité au niveau des langues, régionales ou nationales, est-ce qu’il y a ou peut y avoir un fonds linguistique varié ?

      

Blandine : On a déjà un fonds documentaire pour l’apprentissage de langues étrangères, ou au contraire, pour l’apprentissage du français par des personnes étrangères, et des magazines en langue étrangère (qui permettent d’être un peu plus à jour sur l’actualité). Notre fonds documentaire "physique" va être mis au goût du jour ; il y a aussi les ressources numériques par le département, via la médiathèque Côte-d’Or, permettant d’apprendre des langues et de les pratiquer pas seulement par la lecture, mais aussi à l’oral.

      

Et des ouvrages, par exemple des romans, dans les langues des minorités qui vivent à Quetigny ?

      

Véronique : On a des albums en arabe... mais pour les romans, on en a principalement en anglais, en allemand, en italien, en espagnol.

      

Blandine : Ce n’est pas toujours évident de trouver auprès des libraires des ouvrages en langue étrangère, sachant que nous-mêmes ne sommes pas toujours compétent·e·s dans les langues en question. Si on a mis l’accent sur les albums, c’est pour permettre aux enfants, mais aussi aux parents qui apprennent le français, de pouvoir faire des parallèles.

      

Nous avons abordé cette question parce que des ouvrages qui ne sont pas en français peuvent « servir d’appât » à des gens qui reviendront après cette première expérience.

      

Véronique : Quand je me suis un peu occupée du fonds « langues », ce que j’aurais aimé, ce sont des livres pratiques en langue étrangère. Ça peut être un bel appel pour les lecteurs... On voyage à l’étranger, et, quand on revient, ça serait intéressant d’avoir par exemple un livre de cuisine en arabe... ça marcherait mieux qu’un roman ! C’est ça qu’il faut qu’on arrive à mettre en place. J’ai essayé d’acheter des livres de cuisine en arabe, en passant par un libraire à Paris, et je n’ai pas réussi. C’est vraiment compliqué, pour des raisons administratives en particulier. Je pense qu’il faut que ces fonds-là soient construits par les lecteurs, et ils seront le reflet des personnes qui viennent nous voir.

      

Je ne pense pas qu’à l’arabe ; d’ailleurs, il y a beaucoup de langues en Afrique, par exemple. Il y a aussi le turc, le laotien...

      

Véronique : On a une méthode de wolof... Il ne faut pas trop s’éparpiller, mais il faut que ça ressemble à la population de Quetigny, qui est très variée. Avec les collégiens, on a essayé de leur faire lire des contes qui ont un rapport avec leur pays, et ensuite ils proposaient une recette de cuisine de ce pays. C’était intéressant, et c’est le genre de chose qu’il faut développer.

      

Blandine : Après, on capte plutôt des personnes qui voudraient apprendre le français... et on pourrait les solliciter pour avoir des ouvrages dans leur langue d’origine.

      

Une lectrice, un lecteur, ou une petite cellule allophone pourrait aussi (avec le fablab ?) traduire en français un livre étranger, pour le mettre à disposition... Qu’en pensez-vous ?

      

Véronique : Il faut venir le faire ! (rires)...

      

Et serait-il possible, juridiquement, de profiter de voyages de Quetignois·es (en Afrique, par exemple) pour leur racheter des ouvrages qu’ils auraient achetés là-bas ?

      

Véronique : Non, c’est illégal. Il faudrait que ce soit du don ou de l’échange... Avec des associations, peut-être.

 

Vous nous avez proposé, avant cette interview, une visite du bâtiment, qui nous a beaucoup impressionnés par la sobriété, l’élégance, la commodité voulues par l’architecte... Sur quels aspects voudriez-vous insister, pour donner le sens de tout ça ?

      

Véronique : C’est un lieu de vie !

      

Blandine : On a la chance d’avoir un super-bâtiment, très bien conçu, avec des commodités très chouettes, des fauteuils très confortables... Mais ce sur quoi il faut vraiment communiquer, c’est l’ambiance, la convivialité qu’on veut instaurer dans tous les espaces de la Parenthèse, le fait qu’on y vienne juste parce qu’on a envie de profiter, de voir des gens, de partager ; les échanges dans un lieu de vie où nous devons faire en sorte que chacun puisse s’y sentir bien et avoir une raison d’y venir, que ce soit pour des jeux vidéo quand on est jeune — ou moins jeunes, d’ailleurs —...

Véronique : il y a aussi des serious games  (à la fois ludiques et pédagogiques) ; et ça, ça fait beaucoup d’intergénérationnel !

 

Blandine :  pour de la lecture, pour bavarder, se retrouver au café solidaire ; on peut y venir avec des tout-petits, dans le cadre scolaire, pour jouer...

      

Véronique : Le jeu, c’est très important : respecter l’autre ! il y a des tas d’applications qui ne sont pas forcément tout de suite évidentes, mais qu’on apprivoise... Dans un lieu de vie, on apprend tous à se connaître, et c’est ça qu’il faut faire !

      

Blandine : En plus du quotidien, il y aura des soirées autour de différentes thématiques, de différentes compétences, il y aura des spectacles, des conférences, une activité aussi qui permettra de découvrir, de se connaître, de partager...

      

Véronique : Un lieu de vie et un lieu de connaissance, parce qu’on n’a jamais fini de s’instruire. C’est important de ne pas l’oublier, parce qu’il s’agit certes d’un lieu de vie, mais aussi d’un lieu où on grandit tous ensemble et où on fait grandir la communauté. C’est ça qui est important.

 

Grand merci pour votre accueil et pour la clarté de vos propos. Vous nous avez consacré du temps, à un moment où vous êtes très occupées, et nous vous en sommes, comme nos lecteurs le seront aussi, reconnaissants.

 

 

 

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