top of page
lalettre.jpg
lettre 29 avr.jpg

Le CETA, accord de libre-échange entre l'Union Européenne et le Canada, est en application provisoire depuis septembre 2017, mais n'a toujours pas été ratifié par la France, comme par 9 autres pays (Belgique, Bulgarie, Chypre, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Pologne et Slovénie). L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi de ratification en 2019 par 266 voix contre 213, mais ce projet de loi n'avait pas été mis à l'ordre du jour du Sénat, faute de majorité.

Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste – Kanaky a décidé d'insérer ce projet de loi dans sa niche parlementaire du 21 mars et le Sénat a voté contre.

 

Des bénéfices économiques et environnementaux très contestables

 

Tout de suite, les partisans du traité ont critiqué ce vote, arguant du fait que de toute façon 95 % du traité est déjà en application provisoire depuis septembre 2017, et qu'il est bénéfique tant pour les échanges économiques que pour l'environnement... Or tout cela est loin d'être conforme à la réalité  :

- Les exportations de l'UE vers le Canada n'ont augmenté que de 0,7 % en volume (contre 34 % entre 2012 et 2017, période précédant la mise en application provisoire du traité)

- Les importations de L'UE ont surtout porté sur des combustibles fossiles (y compris le pétrole issu des sables bitumineux), des minéraux, engrais, produits chimiques et plastiques.

- En ce qui concerne les échanges de services, ce sont essentiellement les secteurs des voyages et des transports qui ont  augmenté, générant un accroissement des émissions de gaz à effet de serre.

- Enfin, le Canada exerce de plus en plus de pressions sur les normes européennes existantes et leur renforcement prévu par les mécanismes de dialogue et de coopération réglementaire, alors  qu'il n'est même pas tenu de respecter intégralement les normes européennes (exemple : l'alimentation par des farines animales dans l'élevage, interdites en Europe mais autorisées dans les importations canadiennes). Le Canada remet continuellement en question la légitimité des règles européennes visant à garantir que les denrées alimentaires, les animaux et les produits d’origine animale mis sur le marché de l’UE respectent l’obligation d’assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l’environnement.

 

Règlement des différends entre investisseurs et États très dangereux

 

La partie du traité qui reste à valider porte surtout sur le règlement des différends entre investisseurs appelé ISDS (Investor-State Dispute Settlement). En cas de désaccord entre un investisseur et un État, des cabinets d'avocats d'affaires sont sollicités par les protagonistes. Ces cabinets d'avocats s'entendent pour nommer des juges « indépendants » (en fait, des avocats d'affaires internationaux) qui traiteront le litige, le plus souvent au détriment des États pour obstruction et gêne au commerce.

En 2015, la Commission européenne a transformé cet ISDS en ICS « Investment Court System » (système judiciaire sur l’investissement) pour faire croire que ce nouvel organisme  est indépendant et supposé protéger le droit à réglementer des gouvernements. Or il n'en est rien : il habilite des milliers d’entreprises à contourner les systèmes juridiques nationaux et à poursuivre les gouvernements devant des tribunaux parallèles si des lois et des réglementations limitent leur capacité à réaliser des bénéfices. Cela ouvrirait la voie à l’accaparement de milliards d’argent public par les multinationales. Il restreindrait l’élaboration de politiques souhaitables en matière de protection des individus et de la planète. Enfin, il menace d’enfermer définitivement les pays membres de l’UE dans le régime d’injustices de l’ISDS.

 

Ces vingt dernières années ont été le théâtre de plaintes d’investisseurs réclamant des milliards de dollars contre des législations et des mesures gouvernementales d’intérêt public ayant prétendument entravé le profit d’entreprises. Sur tous les continents, des lois contre le tabagisme, des interdictions de produits chimiques toxiques, des politiques de lutte contre les discriminations, des mesures pour la stabilité financière, des restrictions à l’encontre de projets miniers polluants ont été contestés, entre autres.

En dépit de quelques progrès (par rapport à l'ISDS) de procédure, un processus de sélection des arbitres amélioré, des règles éthiques plus fortes et la création d’un organe d’appel), ce nouveau système d'ICS est dangereux pour la démocratie, les lois d’intérêt général et les fonds publics.

 

Après le refus du Sénat de ratifier l'accord, le texte doit repasser devant l'Assemblée Nationale, mais le gouvernement refuse de le mettre à l'agenda, car il n'aura pas de majorité. C'est une fois de plus la marque de son mépris du Parlement et un déni de démocratie. Tant que tous les États n'auront pas ratifié cet accord, il continuera à s'appliquer provisoirement. Le parlement de Chypre a rejeté le projet, ce qui devrait  remettre en cause son application provisoire, mais le gouvernement chypriote n'a toujours pas notifié ce rejet à la Commission européenne, ce qui permet à l'accord de continuer de s'appliquer. Certes, cette application provisoire est peu utile pour l'économie européenne et néfaste pour l'environnement, mais tant que le CETA n'est pas ratifié, l'ICS n'est pas applicable, ce qui reste une protection pour la souveraineté.

Retour au sommaire

Vers notre site web

Je souhaite inscrire un·e ami·e à cette lettre

Mes avis sont les bienvenus

Je souhaite ne plus recevoir cette lettre

logoRQ.png
bottom of page